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Wednesday, May 22, 2013

Bobo Dioulasso (la maison des Bobo-dioula) et Banfora ... Le Burkina de la fraîcheur


Que de choses à raconter, ne sais même pas par où commencer !

Commençons par suivre le fil des événements afin que tout le monde s’y retrouve :

Nous avons donc posé nos sacs à dos sur le canap’ de mon ami Idrissa à Bobo dans le quartier de Koko, puis, sans même nous reposer, nous voilà repartis sur le bord du goudron avec Salif, un petit gars tout mince, mais endurant avec son tee-shirt de basket et sa casquette. Nous sommes d’abord allés visiter la mosquée de Bobo, car 16 :00 approchait à grands pas, et que l’Imam appelle à la prière à 15 :45 pour la donner ensuite à 16 :00 pétantes.
Pour y entrer, il faut se glisser par une petite porte de 1 mètre 50 de haut, pas plus après avoir enlevé ses chaussures sur un petit tapis coloré à l’entrée. L’odeur y est un peu âcre, la poussière vole paisiblement, illuminée par les minces filets de lumière perçant le toit fait de banco et de tiges de kapokier. Cet édifice date de 1890, construite par l’Almani Sidiki Sanon et nous a impressionnés par son architecture, qui ne ressemble en rien à ce que nous avons pu admirer de nos jours. Le soleil tape sur les deux magnifiques minarets et à travers les petites fenêtres creusées dans les murs épais. Nous marchons à pas feutrés sur les nattes étalées parterre à perte de vue, d’un bout à l’autre du bâtiment. 
La petite porte
mosquée de Bobo
Il faut zigzaguer entre les piliers en bois qui maintiennent la construction depuis sa construction. Au sol, des hommes étendues, profitant de la fraicheur du lieu, patientent pour la prière en rêvant. Il faut leur passer au-dessus, puis escalader les petites marches en terre qui mènent sur le toit et aux minarets. Lorsque nous sommes à l’intérieur, le muézine commence l’appel à la prière, d’un « Allahu Akbar » mélodieux. Au son de sa voix, nous voilà sur le toit, avec une vue prenante sur le quartier, écoutant les explications de notre guide sympathique.

L’accès aux deux minarets est interdit si ce n’est pour une prière individuelle, durant laquelle la personne ne doit pas sortir de la pièce dans laquelle elle est enfermée. Ni pour uriner, boire ou manger. Il lui faut donc toujours s’arranger avec quelqu’un de son entourage qui lui amène des vivres à la tombée de la nuit. Le son de la voix de l’Immam et de ses 4 muézines sort par des cavités creusées dans le toit et que l’on recouvre de poteries lorsqu’il pleut.

Cour de justice animiste: le trou où
le coupable met sa main et attend
le verdict des génies
La mosquée est divisée en plusieurs parties, dont les deux plus marquantes : la zone des hommes, et la zone des femmes, qui n’avaient pas accès à la prière dès la construction. Une partie supplémentaire leur a été ajoutée dans les années 50, et laisse l’accès à celles qui ne sont pas « réglées » (choses de femmes !), car cela est impure.

Après cela, nous traversons la rue en direction de la vieille ville. Celle-ci est découpée en 4 zones :

- les animistes : ce sont les « sorciers », qui rythment les événements de la vie par des cérémonies. Les fétiches sont à chaque coin de rue, dans chaque maison. Et chacun a une signification. Il y a les fétiches qui protègent la maison, et que l’on place sur le toit de la maison ou à l’entrée contre les mauvaises personnes, les voleurs et les mauvais sorts.
quartier des animistes
Puis il y a ceux qui protègent le quartier, souvent deux branches de bois surmontés d’une calebasse, où 4 traits pour la femme et 3 traits pour l’homme sont gravés dans le bois.

- les musulmans : ils sont arrivés au début du XVII ème siècle, juste au moment de la construction de la mosquée et ont eux aussi leurs pratiques et leurs lieux de prière.
- les forgerons : de père en fils, au sein des familles, les forgerons faisaient des armes en bronze et fer, et se sont maintenant diversifiés. Ils sculptent des statues, statuettes, du matériel de cuisine, ou de travail pour les paysans. Certains sont même de vrais artistes !

-les griots : les griots sont les musiciens, les passeurs de mots qui communiquaient les informations aux autres villages à l’aide de leurs instruments de musique (djembés, balafons ...). Au Burkina, et principalement dans la région de Bobo, la musique rythme tous les moments de la journée, et reste très présent. Il n’est pas rare de se promener dans le pays et d’y entendre le son d’un balafon, ou un djembé porté par le vent.

Arrêt Dolo (bière locale)
Ce quartier est découpé de façon étonnante : on y monte et descend comme sur une colline, cheminant à travers de petites ruelles plus étroites les unes que les autres. Les portes se surmontent presque, au devant desquelles des femmes font la lessive dans des bassines de toutes les couleurs, ou cuisinent un plat dont l’odeur fait tourner la tête. Les enfants, par dizaines, comme toujours, accourent de tous les coins pour saluer les « toubabou » (blancs en djoula) et se moquer de la couleur rouge sur le nez de Didac. Certains demandent un bic (stylo), des cahiers, de l’argent, des bonbons ... 
mur du quartier des forgerons
Voilà leur image du blanc et de ce que nos prédécesseurs ont laissé derrière eux. Je reste encore partagée entre le fait que nous ne représentons plus le colonialiste enchapeauté, mais un portefeuille ouvert et la vision d’une Europe biaisée... Et même si je m’obstine à leur expliquer que rien n’est rose là-bas non plus, et que la richesse n’est que dans les sitcoms qu’ils s’agglutinent pour regarder après le repas de midi et le début de soirée, cela ne fonctionne qu’à moitié.

rivière aux poissons sacrés
Nous sommes arrivés, pour terminer, au bord de la rivière aux poissons sacrés. Une rivière en contrebas du quartier, jonchée d’ordures et dont les eaux noires peu profondes ne donnent pas confiance. Pourtant, les poissons y survivent. Ce sont d’énormes poisson-chats qui se nourrissent ... de ce qu’ils trouvent.

C’est à cette endroit qu’Idrissa nous avait dit que sa femme et ses deux enfants habitent. Au coin de la rue, assise sur le sol, elle lave son fils de 5 ans et sa fille qui vient à peine de fêter ses 1 ans et 3 mois, auprès d’une amie qui trie les graines de riz. Elle ne parle pas bien le français et Salif nous fait la traduction. Idrissa nous a demandé de faire des photos de sa petite famille, car il les a perdu lors d’un voyage au Sénégal, et il est triste de ne plus pouvoir les admirer le soir avant de se coucher.
Branle bas de combat, on habille la petite de sa plus belle robe, et le fils, à peine réveillé, enfile ses beaux vêtements. La séance prises de vues tourne au film de quartier. Les enfants veulent tous être dessus, et lorsqu’ils voient leurs visages sur l’écran de mon appareil, ils poussent des cris de joie et de surprise. Une belle cacophonie comme on les aime ! 
Enfants d'Idrissa
Mais le résultat est plutôt pas mal, et la femme d’Idrissa parait satisfaite bien qu’elle reste d’un calme paisible et perturbant, esquissant tout de même un large sourire et nous demandant des nouvelles de son mari qu’elle n’a pas vu depuis plusieurs mois.
Salif et ses neveux
Nous sommes un peu fatigués, et après une bonne douche en plein air à l’aide d’un seau et d’un gobelet, nous décidons de casser la croûte dans un resto conseillé par le guide (le Dankan) : la cuisine est bonne, mais le personnel plutôt désagréable...

Au dodo ! Une grosse journée nous attend demain : départ pour Banfora à 14h, après avoir visité le Grand Marché de Bobo.
Debout! Après une douche au gobelet, nous voilà fin prêts pour partir. Petit déjeuner dans un kiosque sur la route du centre-ville en compagnie de Salif, déjeuner habituel depuis mon arrivée dans le pays :

- un yahourt (prononcé « yaou » ici), ou un dégué si pas de yahourt (yahourt où l’on ajoute des graines de petit mil)
- un Nescafé pour « pissi » (100 FCFA) que l’on touille vivement pour faire monter la mousse.
- un beignet à 25 FCFA pour tremper dans le yahourt
marché de Bobo Dioulasso
- et bien sûr un sachet d’eau bien fraîche pour accompagner tout ca ! ;-)

Après avoir déposé nos sacs chez un amis vendeur d’habits de notre guide, nous nous rendons dans le marché. Ce marché est différent de celui de Ouaga : il n’y a pas d ‘étage, et il me fait encore davantage penser à un souk marocain. 
vers séchés sur le marché
Des tentures de toutes les couleurs cachent la lumière du soleil, et dans certains petits coins, il est même impossible de se croiser. Chaussures de toutes sortes, de toutes les couleurs et ... pour tous les goûts, récipients de toutes sortes, épices de toutes les couleurs, vers séchés pour mettre dans la sauce (je veux essayer !), produits de beauté, boules de karité empilés de manière spectaculaire, maillots de foot du monde entier, charbon, bouffe pour tous les appétits, tissus colorés, fruits et légumes, arachides, souvenirs, et des mangues à n’en plus pouvoir (c’est la saison), et de la taille d’un ballon de foot pour certaines ... 
Dans ce brouhaha et cette pagaille, de vieilles femmes font tranquillement leurs courses.

stand matériel de cuisine
Négociation pour deux paires de tongues (500 FCFA chacune) pour la douche réussie après 15 minutes devant le stand... Ici c’est normal, si tu veux le prix, il faut prendre le temps !



Nous sommes ensuite partis pour la gare Rakieta pour prendre notre bus en direction de Banfora. Dans ce bus, pas de clim, pas de places définies, et une foire pour rentrer, car tout le monde n’a pas réservé pour cette heure-ci. Ouf ! nous avons deux places tout au fond du bus aux côtés de trois hommes calmes.

VROUMMMMMM !!! 1h30 de trajet plus tard, sur une route à une seule voie et 5000 coups de klaxon (ici les conducteurs doivent sûrement avoir l’épreuve « klaxon » au permis de conduire !), nous voila en gare de Banfora, et Patrice, notre guide rasta, est déjà là pour nous attendre, accompagné de son grand sourire qui ne laisse jamais son visage.

Nous nous asseyons dans un petit kiosque frais pour discuter de notre programme. Il nous faut une moto pour se déplacer, et nous avons prévu un programme chargé ! C’est parti pour l’aventure, après être allé négocier seul la moto (peut être que le loueur ne ferait pas les mêmes prix s’il voyait notre tête ...), nous le suivons sur la piste qui mène à notre campement (le Baobab), au fin fond de la brousse. Une adresse à ne pas manquer !

Coucher de soleil
Arrivés là bas, le maître des lieux, Yaya et son «petit » Adama nous attendent et nous avaient préparé notre case. Un petit nid tout joli ! Et en plus, personne d’autre n’a réservé pour cette nuit ! Tranquillité ! Après une partie de pétanque avec Patrice, nous allons nous balader dans le coin. 
Deux grands Kapokiers (de la famille des baobabs) se dressent au bord de la petite piste. Nous sommes à l’entrée d’un petit village qui vit de l’élevage, du tissage de paniers et de la production de la bière locale. Nous sommes suivis par une bande d’enfants et assistons à un coucher de soleil magnifique sur la savane environnante, aux couleurs rougeoyantes, passant du rouge au orange, puis rose, violet et enfin bleu profond.
La mante religieuse, compagnon d'un soir

Pour finir, nous avons dévoré un repas préparé par Yaya (frites, alocos et viande de boeuf), puis admiré les étoiles. C’est incroyable ce que le ciel est différent ici. Didac était sous le charme. 
Le ciel est tellement noir, qu’on a l’impression de voir toutes les étoiles qui puissent le peupler. A la lumière des lampes à pétrôle, nous nous sommes mis au lit, après ... une douche au gobelet.
Je vous laisse à vos rêveries !

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