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Tuesday, May 28, 2013

11 Mai, Hommage à Bob Marley


Baignade
Après notre retour et une bonne nuit de sommeil bien mérité ... (Nos fesses se souviennent de Banfora !), nous partons pour une nouvelle journée découverte à moto, avec Salif, le petit frère d’Idrissa. 
Nous commençons par Dafra, lieu animiste en pleine forêt. Avant de partir, il ne faut pas oublier d’acheter un jeune poulet sur la route, pour l’offrir en sacrifice afin d’accéder au lieu de culte.

Dafra
Nous nous arrêtons donc au bord du goudron en sortant de Bobo, et le poulet continue le trajet pendu par les pattes au guidon de Salif, la tête en bas. Ici, il est tout à fait normal de voir des motos d’où pendent un vingtaine de poules qui poussent des gloussements à chaque arrêt.
Après un (trop) court temps sur le goudron, nous commençons à nous enfoncer en brousse par une piste de terre rouge serpentant entre des arbres. Nous y croisons des femmes, un panier sur la tête, qui récoltent des pierres, ainsi que des baies qu’elles iront vendre au marché. D’autres vont couper du bois, ou cultiver, marchant sur des kilomètres sans âme qui vive.

Dafra, mare aux poissons sacrés
Après avoir passé un pont en pierres abandonné, sur lequel deux enfants sortis de nulle part nous ont poursuivis pour nous serrer la main, descendu des pierres comme sur un terrain de moto-cross, escaladé des racines en croisant les doigts pour ne pas percer un pneu, nous sommes arrivés sous l’arbre à partir duquel il faut marcher à pieds.

Les paysages sont à couper le souffle, de la verdure à perte de vue, des falaises impressionnantes tombant dans une forêt luxuriante, et des points de vue dignes du Roi Lion !
Arbre sacré de Koumi
Au loin, la masse sombre des arbres centenaires entourant le lieu de culte se rapprochent doucement. Nous croisons des groupes de pèlerins avec leur poulet au bras, ou remontant vers la civilisation après leur offrande.

Koumi, village en terre cuite
Nous finissons par descendre des rochers sous une voûte de verdure, pour arriver enfin au pied d’une cascade, sur un très large rocher plat jonché de sang séché ou frais, de plumes de toutes les couleurs, de boyaux envahis par les mouches, et de peaux de bêtes (agneaux, chèvres), dont l’intérieur est exposé à la vue du visiteur. Une odeur âcre s’échappe des feux allumés par les féticheurs qui brûlent les plumes des poulets avant de leur ouvrir le ventre pour en récupérer les entrailles que nous devons ensuite servir en offrandes aux poissons sacrés sur une plateforme juste en dessous. Puis ils font griller le reste et l’engloutissent.
Koumi
Le vieux se lève, s’approche de Salif, et lui prend le poulet des mains. Il nous somme ensuite de le suivre jusqu’au rocher des sacrifices, sur lequel il égorge le poulet puis le laisse se débattre jusqu’à la mort. Didac doit tourner les yeux pour ne pas vomir. La position du poulet lorsqu’il a fini de se battre avec la mort est très importante. S’il fini sur le ventre, alors c’est une personne intègre et honnête qui a fait le sacrifice, et le voeu sera exaucé. Cependant, si le poulet finit sur le dos, une part
Guinguette, pont suspendu
sombre habite la personne, et le voeu coûtera à nouveau un poulet, afin qu’il finisse par se coucher sur le ventre.
Une fois nos boyaux en main, nous nous approchons des rives de la mare aux poissons sacrés après avoir descendu quelques rochers en pente rude. Les poisson-chats sont énormes, et atteignent parfois 1 mètre de long.
Nous remontons ensuite à travers ce paysage de contes et repartons vers le centre pour nous restaurer, même s’il nous aura fallu le trajet pour nous remettre.

La Guinguette
Après cette pause méritée, nous visitons Koumi, village en terre rouge, typique de la région, et qui garde ses traditions telles qu’elles. Le village est spécialisé dans la poterie (les « canaris » comme on les appelle ici, sortes d’immenses jarres qui servent à conserver les aliments, et dans la préparation du Dolo). Les forgerons fabriquent quant à eux des outils pour l’agriculture et des ustensile pour la cuisine.

Pour finir, nous nous sommes dirigés vers la forêt de la Guinguette.
C’est aussi un lieu sacré de culte, mais aussi et surtout une réserve protégée, où les animaux repeuplent doucement les arbres et le cours d’eau.

Nous avons marché, accompagnés de notre guide garde-forestier, sous des lianes, des arbres dont la cime ne nous apparaissait même pas, entre des fougères plus hautes que nous ...
Une nature luxuriante nous permettant de nous revigorer un peu, au son des oiseaux et animaux sauvages qui peuplent les lieux.

Le soir, pour l’anniversaire de la mort de Bob Marley, qui est très largement fêtée dans le pays, des concerts de reggae sont organisés dans toutes les villes du pays. Nous sommes donc allés assister au concert live de Samska le Jah au Théâtre de la ville en plein air. Un moment de transe inoubliable...
Pêcheurs de Bala
Bala
Des centaines de personnes sont agglutinés sur les gradins, assis en haut des panneaux publicitaires à plus de 8 mètres du sol, les pieds au vent. Tout le monde saute dans tous les sens au rythme des chansons et des différents artistes qui sont venus en première partie de l’artiste. Lors de son entrée en scène, c’est la liesse dans le public, tout le monde crie son nom, des gens grimpent sur la scène pour être filmés ou photographiés à ses côtés, et c’est l’émoi pendant toute la durée du show. 
La chair de poule hérisse nos poils. 
Un grand moment de reggae politique, rythmé par des propos violents à l’égard des dirigeants en place dans le pays et tous les pays voisins, ainsi que contre « l’empire colonialiste français et européen » qui vient piller les richesses de l’Afrique en instaurant des dictatures. Il faut se faire petits et applaudir !

Pêcheur de Bala
Le lendemain, nous partons pour Bala et sa mare aux hippopotames. C’est un site classé et protégé, parc classé forêt biosphère par l’Unesco depuis 1987. La chasse et l’élevage y sont interdits, et la pêche y est très réglementée.
Les pêcheurs, qui nous font visiter le lac à bord de leur pirogue de pêche, et le garde-forestier, nous ont réservé un accueil plus que chaleureux, et nous avons beaucoup ri !

Mare aux hippos, Bala
Le lac est magnifique, entouré de verdure et de forêt en tunnels dignes de paysages équatoriaux d’Amérique du Sud. De nombreuses espèces d’oiseaux y ont élu domicile, plus majestueux les uns que les autres. Et à quelques mètres de nous, les hippopotames nous réservent de belles surprises, se faisant laver par des oiseaux posés sur leurs têtes, et profitant d’un après-midi en famille.
Bala
Une belle promenade !

Puis, direction Koro, un village troglodyte perché sur une colline. Ce village est peuplé d’agriculteurs, de commerçants et de forgerons , qui ont décidé d’élire domicile sur ce promontoire au XIXème siècle, afin de se protéger de l’invasion et de la colonisation des musulmans de Traoré.

Le puit alimentant le village en eau est en bas de la colline, et les femmes doivent faire le trajet à travers les rochers, un seau sur la tête, matin et soir pour se ravitailler. Une escalade impressionnante.
Koro
Il existe deux types de fétiches, comme à Bobo, par maison (sur le toit, ou bien incrusté dans l’entrée de la maison), et collectifs. Et ces fétiches se distinguent par ceux dits de vœux (un nouveau travail, des enfants, des jumeaux, de l’argent ...) et ceux de protection (de la famille, contre les maladies, la faim...). Lorsque les vœux se réalisent ou que la famille se sent protégée, on offre un poulet qu’on égorge sur le fétiche avant d’étendre le sang sur le sol en guise de remerciements.

Nous rentrons fatigués mais la tête bien remplie sur Bobo.
Fétiches dans le village de Koro

Le lendemain, nous achetons des mangues (très recherchées sur Ouaga qui n’en produit pas), qui s’appellent « mangues-ananas » pour leur goût intense proche de l’ananas et leur taille impressionnante de la taille d’un ballon de foot.
Une distribution sera faite lors de notre retour, pour régaler les papilles de nos amis ouagalais.

Le carton (acheté pour 100 FCFA à un vieux spécialisé dans la vente de cartons réutilisés : recyclage !) est chargé dans les soutes du bus, aux côtés des motos, sacs de riz, de mil, et de toutes sortes de victuailles ou matériaux en tous genres, et hop ! c’est parti ! A coups de klaxons toutes les 15 secondes sur tout le trajet bien sûr !
Koro, village perché

Un gros dodo, et je réattaque le boulot le jour suivant !

Friday, May 24, 2013

Banfora mon Amour


Premier jour :

Visite des dômes de Fabedougou (ethnie Turka, l’ethnie des nomades chasseurs) : A dos de moto, nous partons pour les dômes sur un chemin à travers les champs de canne à sucre qui s’étendent à perte de vue. Les femmes partent au travail en longues files indiennes sur le bord du chemin, une pioche posée sur l’épaule et un sac de riz vide à la main. Patrice nous explique qu’elles enlèvent  les mauvaises herbes entre les cannes à sucre, le dos courbé sur leur travail toute la journée. Elles nous sourient et nous font des signes de la main lorsque nous les dépassons, un marge sourire aux lèvres.

De grands arbres bicentenaires bordent le bord de la voie non-goudronnée que nous atteignons ensuite. Puis c’est une montée très pentue, et enfin le « péage », une petite cabine en fer postée au bord de la voie dans la montée, avec deux hommes somnolant sur leur vieux fauteuil raccommodé à l’extérieur, mâchouillant une herbe. Patrice pait et discute avec eux un instant en djoula avant de nous indiquer le chemin.


Dômes de Fabedougou
Les dômes ont été découverts au XVIIIème siècle par les Karaboros, peuple de la région. Le lieu est sacré et creusé par la mer qui montait jusqu’ici après la fonte des glaces. Leur forme est étrange, cisellée et douce à la fois. On grimpe, grimpe, et on se hisse sur le plus haut des dômes. Un paysage de tableau s’offre alors à nous à perte de vue : les dômes, puis les champs de canne à sucre et leurs installations d’arrosage gigantesques, puis au loin de petites collines et de petits villages plantés dans une verdure qui tranche avec Ouaga et sa poussière. Et le calme... Pas un bruit, si ce n’est une légère brise et les oiseaux qui font un bruit très différent des oiseaux peuplant nos territoires 
Dômes
européens.

Nous nous sommes postés là, sans bruit, pour un moment. Le guide a allumé sa cigarette et nous avons laissé filer un peu le temps.
Après cette petite pause à l’autre bout du monde, nous sommes redescendus de notre promontoire et sommes repartis en direction des motos pour nous rendre en direction des cascades de Banfora. L’occasion pour nous de nous rafrâichir dans ce pays sans accès à la mer.

Sous de grands manguiers, dans un nuage de poussière, nous arrivons en bas de la falaise en fin de matinée. Une fois le péage passé, et un nouvel arrêt discussion de notre guide qui sert la main à tous les gars entassés sous un abris de jute pour se protéger du soleil et croquant des mangues à peine tombées des arbres à pleines dents, nous garons les motos et entamons notre petite ascension.

Cascades
L’air est doux dans cette région. La respiration se fait plus facile, moins saccadée que dans la capitale.
1ère cascade
Après avoir passé un petit pont de fer rompu traversé par un troupeau de boeufs conduit par un enfant, nous entrons sous une voûte de manguiers centenaires, peuplés d’oiseaux faisant des bruits sortant de l’ordinaire. C’est impressionnant, impossible même d’en voir le sommet pour certains. C’est un moment agréable que de marcher sous ces grands arbres, qui parfois perdent un fruit juteux que les habitants du coin s’empressent de ramasser et de croquer avant de laisser le noyau orangé sur le sol qui en est jonché. 

Pics de Sindou
Après avoir admiré une première cascade dans laquelle de nombreux sacrifices sont effectués, nous commençons à grimper pour s’enfoncer dans la falaise. Au fur et à mesure, nous dépassons la cime des arbres et un paysage surprenant s’offre à nos yeux : à perte de vue, un mélange de jaunes, oranges, et de dégradés de verts. Par ci par là, des villages dont la fumée des feux de bois zigzague dans le ciel, nous montrent le bout de leurs cases. Puis le ciel et son dégradé de bleus. Juchés sur nos rochers, nous sommes pris par ce paysage à couper le souffle.

La seconde cascade est envahie par une école dont les élèves, qui ne savent pas nager, s’aspergent, se jettent dans des chambres à air servant de bouées, et prennent la douche sous le jet de la cascade, tout cela en poussant des cris de joie. Certains connaissent le guide et nous saluent au passage.
Cascades
Au dessus, c’est le coin des musulmans comme l’appelle Patrice : c’est ici qu’ils viennent faire la prière dans le calme sous les arbres, avant de se purifier dans la rivière par un bain. Une ribambelle de tongues est alignée sur les rochers : rouges, vertes, jaunes, bleues, roses ou oranges, ce qui rompt avec la nature environnante.

Enfin, nous atteignons la troisième cascade. Personne ne s’y aventure, car les eaux sont plus profondes, et comme personne ne sait nager, il vaut donc mieux se cantonner à celles de dessous.
Un coin tranquille, qui nous permet de nous relaxer sous les arbres au son des sauterelles et des lézards qui courent entre les rochers. En deux temps, trois mouvements, nous sommes dans l’eau pour une après-midi entière à en profiter.

Campement Baobab
En fin d’après-midi, le ciel commence à gronder, et des nuages arrivent à vive allure. Nous rangeons « sap sap » (vite vite en mooré) nos affaires, et nous prenons le chemin du retour pour ne pas être devancés. Ouf ! après avoir emprunté les chemins dans les champs de canne à sucre, nous arrivons au campement juste à temps, et c’est lorsque nous prenons notre douche que l’averse s’écrase sur nous. Cela nous permet de passer une excellente nuit après un bon riz gras dans un resto pas trop cher.

Deuxième jour à Banfora :

Le réveil est aux aurores, car nous avons 120 km aller-retour en motos sur des pistes non goudronnées pour atteindre les pics de Sindou, à une 40aine de km de la Côte d’Ivoire, et une 30aine du Mali.

Le trajet fût ... inoubliable !
Pics de Sindou
La route, jonchée de trous et de bosses de toutes tailles et toutes profondeurs, tourne et retourne dans tous les sens, fréquentée par des camions roulant à vive allure, des taxis brousse, des motos, vélos, piétons et des animaux plus incohérents les uns que les autres...
J’ai d’ailleurs failli nous offrir un steak de chèvre pour le dîner, et nous avons évité l’animal qui s’est jeté sous mes roues de justesse ! ;)

Après un long trajet sans fin sur la piste, qui nous a tellement empoussiéré que nous sommes devenus orange tous les trois, nous avons enfin atteint les Pics de Sindou et ... cela valait vraiment la peine ! Les pics déchirent le ciel comme sur une peinture de Dali. On se sent vraiment petits face à ces géants naturels. Après avoir garé les motos, nous avons commencé l’ascension. Petite rencontre avec un singe descendu chercher à manger, qui, apparemment est rare à voir, puis nous arrivons au centre de ce décor de cinéma, entourés de ces rochers noirs regorgeant de fer.

Le Baobab Sacré
Les chauve-souris
Ici vivait l’ethnie nomade des Karaboros, protégés par un génie qui leur fournissait tout ce dont ils avaient besoin, en nourriture, vêtements ... Mais à une condition : seul l’homme chargé de communiquer avec lui sur leurs besoins n’avait le droit de descendre de la montagne à sa rencontre. Un jour, une jeune fille, curieuse, décida de le suivre en cachette pour en avoir le cœur net et voir si ce qui se disait était vrai. Arrivés en bas de la montagne, l’homme rencontre le génie. Celui-ci entre dans une colère noire en apercevant la jeune fille, et décide de mettre fin au contrat passé avec le village. C’est à partir de ce jour là qu’il leur fallut descendre de leur promontoire pour aller chasser et cueillir des fruits afin de subvenir à leurs besoins. Cela reste un lieu sacré où de nombreuses cérémonies ont lieux, et des sacrifices sont fait pour les grandes occasions, dans un lieu tenu secret que personne ne peut nommer ou pointer du doigt.
Lorsque nous arrivons au sommet de l’un des plus haut pics, nous nous asseyons pour admirer la vue imprenable en contrebas : les paysans travaillent dans les rizières et ressemblent à des fourmis colorées. Yann Arthus Bertrand aurait une bien belle prise de vue ! Les tons de verts tendres et jaunes profonds s’opposent au bleu du ciel et de ses nuages gris annonçant la pluie. Les animaux tirent les outils de travail, petites tâches blanches, noires, ou marrons s’animant lentement.
Les lignes des rizières laissent ensuite place à une forêt luxuriante au loin. Tout ceci dans un silence ponctué de bruits d’animaux. Il ne fait pas trop chaud grâce à la pluie de la veille, et nous en avons profité un long moment avant de reprendre lentement la route. La forme des rochers laisse le visiteur rêveur, à chacun son imagination : visages, animaux, ...

Puis c’est le retour, en direction cette fois du Baobab Sacré, bien gardé par son vieux sage depuis 31 ans. C’est le baobab qui l’a choisi. Un matin, il s’est réveillé à l’intérieur du tronc de l’arbre, sans savoir qui avait bien pu le mettre là. C’est ainsi qu’il a été désigné selon les sages du village, et il se doit maintenant de veiller sur l’arbre et ses pouvoirs.
Le vieux du Baobab

Pour entrer à l’intérieur, il faut se glisser à travers un petit trou tout en bas du tronc. C’est là que le spectacle s’offre à nos yeux après qu’ils se soient habitués à l’obscurité : des chauves-souris par centaines perchées au dessus de nos têtes, et des abeilles autour de leur ruche construite un peu plus haut. Et au centre, une sorte d’antenne partant du sol et allant droit jusqu’en haut de l’arbre, là où nos yeux s’arrêtent et que personne n’a le droit de grimper. C’est cette antenne qui permet à l’arbre de
communiquer avec le ciel et les ancêtres. Le vieux agite une cloche en émettant des « yayayayayayaya » pour faire « danser ses amies les chauve-souris ». Son rire restera gravé dans nos mémoires. Entre sorcellerie et méchants dans les films bon marché. Ca donne un peu la chair de poule ! Mais il reste souriant, riant à gorge déployée à chaque fin de phrase. Il nous fait porter des cornes de boeufs sacrées entassées dans un coin, qui son des sacrifices en l’honneur du Baobab sacré. Avant de passer la porte de sortie, il faut tremper ses mains dans un récipient naturellement creusé dans le bois dans lequel se stocke l’eau de pluie pour être « bénis par l’arbre ». Des scorpions noirs nous attendent cachés dans une cavité à côté du trou pour saluer notre départ.

S’en suit la séance photos sur lesquelles le vieux aime faire des mises en scène et des grimaces ! :)
On le laisse ensuite (en lui glissant un petit billet au creux de la main au moment des salutations) au pied de son arbre, sur une chaise en bois, au son de sa radio des années 50 accrochée à un clou planté dans l’écorce. 
Nous nous faufilons alors à travers les arbres de la forêt de tek, pour revenir sur la piste rouge et nous rendre au lac de Tengrela.

Hippos du Lac de Tengrela
 C’est magnifique ! Une large étendue d’eau bordée de verdure. Le piroguier nous emmène, sur les eaux calmes de ce lieu paradisiaque à la rencontre des hippopotames. Le soleil descend doucement à l’horizon, nous sommes exactement au moment où les couleurs changent et donnent une couleur différente aux éléments du paysage à chaque instant. Nous avons été chanceux, une famille d’une dizaine d’animaux prend sa pause/pose à quelques mètres de notre barque, bâillant aux corneilles, laissant apparaître leurs dents plates gigantesques et poussant des grognements de satisfaction.
Dans ce silence bercé par ces grognements et le clapotis de l’eau, le coucher de soleil accompagne notre retour sur les berges du lac. Un moment de repos et de tranquillité dont nous avions besoin après cette rude journée... Nous rentrons maintenant au campement, pour nous doucher, le fessier douloureux de s’être fait secoué par la moto.

Hion : mon ami Salif croyait même que c’était la marque d’un camion, car un vendeur de sandwichs a écrit çà sur son camion à côté de chez lui à Ouaga. De quoi remettre l’enseigne à sa place ! :D
Le resto est très décoré et le personnel souriant, ca fait du bien de manger de la salade après tout ce temps sans crudités ! Nous avons même pu recharger la batterie de nos portables durant le repas pour mettre le réveil du lendemain.

Après çà, une bonne nuit de sommeil sans électricité s’impose !

3ème jour à Banfora : 

Nous avons décidé de rester tranquilles durant cette journée, et nous n’avons fait que visiter l’usine de mangues communautaire des femmes de Banfora, et sa section noix de cajou.

Nous avons d’abord rencontré « officiellement » le directeur de l’association, qui a noté sur son grand cahier de visites nos noms, métiers, coordonnées ... de manière très bureaucratique et nous avons signé le registre des visites dans un grand cahier grands carreaux bien organisé.
Puis, nous avons suivi nos deux guides, l’un pour les mangues et sa collègue pour les arachides. Tout le processus de fabrication des mangues séchées et de préparation des arachides nous a été expliqué, de l’arrivée des fruits par camion à la mise en sachets, sous vide, pour l’exportation ou la vente sur place, et à tous les dérivés de ces deux matières premières.
A la sortie, nous avons dévalisé la boutique, bu un excellent jus de mangue maison, et goûté au riz sauce de 
la cuisinière de l’association. 

Après cela, nous nous sommes rendus dans un petit village sur le chemin du retour, afin de visiter des "caves" dans lesquelles les femmes tissent les magnifiques paniers originaires de la région. Cela leur permet, avec l'humidité, de garder les tiges souples et de faciliter ainsi le travail.

C’est parti pour le retour vers Bobo !

Wednesday, May 22, 2013

Bobo Dioulasso (la maison des Bobo-dioula) et Banfora ... Le Burkina de la fraîcheur


Que de choses à raconter, ne sais même pas par où commencer !

Commençons par suivre le fil des événements afin que tout le monde s’y retrouve :

Nous avons donc posé nos sacs à dos sur le canap’ de mon ami Idrissa à Bobo dans le quartier de Koko, puis, sans même nous reposer, nous voilà repartis sur le bord du goudron avec Salif, un petit gars tout mince, mais endurant avec son tee-shirt de basket et sa casquette. Nous sommes d’abord allés visiter la mosquée de Bobo, car 16 :00 approchait à grands pas, et que l’Imam appelle à la prière à 15 :45 pour la donner ensuite à 16 :00 pétantes.
Pour y entrer, il faut se glisser par une petite porte de 1 mètre 50 de haut, pas plus après avoir enlevé ses chaussures sur un petit tapis coloré à l’entrée. L’odeur y est un peu âcre, la poussière vole paisiblement, illuminée par les minces filets de lumière perçant le toit fait de banco et de tiges de kapokier. Cet édifice date de 1890, construite par l’Almani Sidiki Sanon et nous a impressionnés par son architecture, qui ne ressemble en rien à ce que nous avons pu admirer de nos jours. Le soleil tape sur les deux magnifiques minarets et à travers les petites fenêtres creusées dans les murs épais. Nous marchons à pas feutrés sur les nattes étalées parterre à perte de vue, d’un bout à l’autre du bâtiment. 
La petite porte
mosquée de Bobo
Il faut zigzaguer entre les piliers en bois qui maintiennent la construction depuis sa construction. Au sol, des hommes étendues, profitant de la fraicheur du lieu, patientent pour la prière en rêvant. Il faut leur passer au-dessus, puis escalader les petites marches en terre qui mènent sur le toit et aux minarets. Lorsque nous sommes à l’intérieur, le muézine commence l’appel à la prière, d’un « Allahu Akbar » mélodieux. Au son de sa voix, nous voilà sur le toit, avec une vue prenante sur le quartier, écoutant les explications de notre guide sympathique.

L’accès aux deux minarets est interdit si ce n’est pour une prière individuelle, durant laquelle la personne ne doit pas sortir de la pièce dans laquelle elle est enfermée. Ni pour uriner, boire ou manger. Il lui faut donc toujours s’arranger avec quelqu’un de son entourage qui lui amène des vivres à la tombée de la nuit. Le son de la voix de l’Immam et de ses 4 muézines sort par des cavités creusées dans le toit et que l’on recouvre de poteries lorsqu’il pleut.

Cour de justice animiste: le trou où
le coupable met sa main et attend
le verdict des génies
La mosquée est divisée en plusieurs parties, dont les deux plus marquantes : la zone des hommes, et la zone des femmes, qui n’avaient pas accès à la prière dès la construction. Une partie supplémentaire leur a été ajoutée dans les années 50, et laisse l’accès à celles qui ne sont pas « réglées » (choses de femmes !), car cela est impure.

Après cela, nous traversons la rue en direction de la vieille ville. Celle-ci est découpée en 4 zones :

- les animistes : ce sont les « sorciers », qui rythment les événements de la vie par des cérémonies. Les fétiches sont à chaque coin de rue, dans chaque maison. Et chacun a une signification. Il y a les fétiches qui protègent la maison, et que l’on place sur le toit de la maison ou à l’entrée contre les mauvaises personnes, les voleurs et les mauvais sorts.
quartier des animistes
Puis il y a ceux qui protègent le quartier, souvent deux branches de bois surmontés d’une calebasse, où 4 traits pour la femme et 3 traits pour l’homme sont gravés dans le bois.

- les musulmans : ils sont arrivés au début du XVII ème siècle, juste au moment de la construction de la mosquée et ont eux aussi leurs pratiques et leurs lieux de prière.
- les forgerons : de père en fils, au sein des familles, les forgerons faisaient des armes en bronze et fer, et se sont maintenant diversifiés. Ils sculptent des statues, statuettes, du matériel de cuisine, ou de travail pour les paysans. Certains sont même de vrais artistes !

-les griots : les griots sont les musiciens, les passeurs de mots qui communiquaient les informations aux autres villages à l’aide de leurs instruments de musique (djembés, balafons ...). Au Burkina, et principalement dans la région de Bobo, la musique rythme tous les moments de la journée, et reste très présent. Il n’est pas rare de se promener dans le pays et d’y entendre le son d’un balafon, ou un djembé porté par le vent.

Arrêt Dolo (bière locale)
Ce quartier est découpé de façon étonnante : on y monte et descend comme sur une colline, cheminant à travers de petites ruelles plus étroites les unes que les autres. Les portes se surmontent presque, au devant desquelles des femmes font la lessive dans des bassines de toutes les couleurs, ou cuisinent un plat dont l’odeur fait tourner la tête. Les enfants, par dizaines, comme toujours, accourent de tous les coins pour saluer les « toubabou » (blancs en djoula) et se moquer de la couleur rouge sur le nez de Didac. Certains demandent un bic (stylo), des cahiers, de l’argent, des bonbons ... 
mur du quartier des forgerons
Voilà leur image du blanc et de ce que nos prédécesseurs ont laissé derrière eux. Je reste encore partagée entre le fait que nous ne représentons plus le colonialiste enchapeauté, mais un portefeuille ouvert et la vision d’une Europe biaisée... Et même si je m’obstine à leur expliquer que rien n’est rose là-bas non plus, et que la richesse n’est que dans les sitcoms qu’ils s’agglutinent pour regarder après le repas de midi et le début de soirée, cela ne fonctionne qu’à moitié.

rivière aux poissons sacrés
Nous sommes arrivés, pour terminer, au bord de la rivière aux poissons sacrés. Une rivière en contrebas du quartier, jonchée d’ordures et dont les eaux noires peu profondes ne donnent pas confiance. Pourtant, les poissons y survivent. Ce sont d’énormes poisson-chats qui se nourrissent ... de ce qu’ils trouvent.

C’est à cette endroit qu’Idrissa nous avait dit que sa femme et ses deux enfants habitent. Au coin de la rue, assise sur le sol, elle lave son fils de 5 ans et sa fille qui vient à peine de fêter ses 1 ans et 3 mois, auprès d’une amie qui trie les graines de riz. Elle ne parle pas bien le français et Salif nous fait la traduction. Idrissa nous a demandé de faire des photos de sa petite famille, car il les a perdu lors d’un voyage au Sénégal, et il est triste de ne plus pouvoir les admirer le soir avant de se coucher.
Branle bas de combat, on habille la petite de sa plus belle robe, et le fils, à peine réveillé, enfile ses beaux vêtements. La séance prises de vues tourne au film de quartier. Les enfants veulent tous être dessus, et lorsqu’ils voient leurs visages sur l’écran de mon appareil, ils poussent des cris de joie et de surprise. Une belle cacophonie comme on les aime ! 
Enfants d'Idrissa
Mais le résultat est plutôt pas mal, et la femme d’Idrissa parait satisfaite bien qu’elle reste d’un calme paisible et perturbant, esquissant tout de même un large sourire et nous demandant des nouvelles de son mari qu’elle n’a pas vu depuis plusieurs mois.
Salif et ses neveux
Nous sommes un peu fatigués, et après une bonne douche en plein air à l’aide d’un seau et d’un gobelet, nous décidons de casser la croûte dans un resto conseillé par le guide (le Dankan) : la cuisine est bonne, mais le personnel plutôt désagréable...

Au dodo ! Une grosse journée nous attend demain : départ pour Banfora à 14h, après avoir visité le Grand Marché de Bobo.
Debout! Après une douche au gobelet, nous voilà fin prêts pour partir. Petit déjeuner dans un kiosque sur la route du centre-ville en compagnie de Salif, déjeuner habituel depuis mon arrivée dans le pays :

- un yahourt (prononcé « yaou » ici), ou un dégué si pas de yahourt (yahourt où l’on ajoute des graines de petit mil)
- un Nescafé pour « pissi » (100 FCFA) que l’on touille vivement pour faire monter la mousse.
- un beignet à 25 FCFA pour tremper dans le yahourt
marché de Bobo Dioulasso
- et bien sûr un sachet d’eau bien fraîche pour accompagner tout ca ! ;-)

Après avoir déposé nos sacs chez un amis vendeur d’habits de notre guide, nous nous rendons dans le marché. Ce marché est différent de celui de Ouaga : il n’y a pas d ‘étage, et il me fait encore davantage penser à un souk marocain. 
vers séchés sur le marché
Des tentures de toutes les couleurs cachent la lumière du soleil, et dans certains petits coins, il est même impossible de se croiser. Chaussures de toutes sortes, de toutes les couleurs et ... pour tous les goûts, récipients de toutes sortes, épices de toutes les couleurs, vers séchés pour mettre dans la sauce (je veux essayer !), produits de beauté, boules de karité empilés de manière spectaculaire, maillots de foot du monde entier, charbon, bouffe pour tous les appétits, tissus colorés, fruits et légumes, arachides, souvenirs, et des mangues à n’en plus pouvoir (c’est la saison), et de la taille d’un ballon de foot pour certaines ... 
Dans ce brouhaha et cette pagaille, de vieilles femmes font tranquillement leurs courses.

stand matériel de cuisine
Négociation pour deux paires de tongues (500 FCFA chacune) pour la douche réussie après 15 minutes devant le stand... Ici c’est normal, si tu veux le prix, il faut prendre le temps !



Nous sommes ensuite partis pour la gare Rakieta pour prendre notre bus en direction de Banfora. Dans ce bus, pas de clim, pas de places définies, et une foire pour rentrer, car tout le monde n’a pas réservé pour cette heure-ci. Ouf ! nous avons deux places tout au fond du bus aux côtés de trois hommes calmes.

VROUMMMMMM !!! 1h30 de trajet plus tard, sur une route à une seule voie et 5000 coups de klaxon (ici les conducteurs doivent sûrement avoir l’épreuve « klaxon » au permis de conduire !), nous voila en gare de Banfora, et Patrice, notre guide rasta, est déjà là pour nous attendre, accompagné de son grand sourire qui ne laisse jamais son visage.

Nous nous asseyons dans un petit kiosque frais pour discuter de notre programme. Il nous faut une moto pour se déplacer, et nous avons prévu un programme chargé ! C’est parti pour l’aventure, après être allé négocier seul la moto (peut être que le loueur ne ferait pas les mêmes prix s’il voyait notre tête ...), nous le suivons sur la piste qui mène à notre campement (le Baobab), au fin fond de la brousse. Une adresse à ne pas manquer !

Coucher de soleil
Arrivés là bas, le maître des lieux, Yaya et son «petit » Adama nous attendent et nous avaient préparé notre case. Un petit nid tout joli ! Et en plus, personne d’autre n’a réservé pour cette nuit ! Tranquillité ! Après une partie de pétanque avec Patrice, nous allons nous balader dans le coin. 
Deux grands Kapokiers (de la famille des baobabs) se dressent au bord de la petite piste. Nous sommes à l’entrée d’un petit village qui vit de l’élevage, du tissage de paniers et de la production de la bière locale. Nous sommes suivis par une bande d’enfants et assistons à un coucher de soleil magnifique sur la savane environnante, aux couleurs rougeoyantes, passant du rouge au orange, puis rose, violet et enfin bleu profond.
La mante religieuse, compagnon d'un soir

Pour finir, nous avons dévoré un repas préparé par Yaya (frites, alocos et viande de boeuf), puis admiré les étoiles. C’est incroyable ce que le ciel est différent ici. Didac était sous le charme. 
Le ciel est tellement noir, qu’on a l’impression de voir toutes les étoiles qui puissent le peupler. A la lumière des lampes à pétrôle, nous nous sommes mis au lit, après ... une douche au gobelet.
Je vous laisse à vos rêveries !