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Thursday, December 3, 2015

Vive le Burkina Faso Démocratique!

Unir un pays désuni, être un chef d’Etat, n’est pas donné à tout le monde. 
Il faut du charisme et de la détermination, particulièrement sur le continent africain. 
Rares sont ceux qui ne s’oublient ou ne se perdent pas, tout comme chaque être humain qui se retrouve face à son destin et ses responsabilités, il faut garder le cap, sans oublier d’où l’on vient. 
Mais c’est ce qu’a fait Nelson Mandela, qui a, contre toutes attentes, réussi à unir l’un des pays les plus multiculturels du continent.
Cela n’est donc pas impossible. Mais c’est une tâche extrêmement ardue dans un pays transitionnaire comme le Burkina Faso. 
Après les événements du 31 octobre qui nous ont tous marqués par leur calme et leur impact, tout se balance.

Je me souviens encore des cris de la foule lorsque nous nous dirigions vers le Parlement : « Blaise dehors ! Blaise dégage ! Libérez Kossyam ! Libérez Kossyam ! Libérez Kossyam ! »
Une ferveur partagée par tous, se diffusant à travers la ville, le pays, le peuple, hommes et femmes unis malgré les différences ethniques et religieuses. Un peuple prêt à tout, même la mort, pour chasser le pouvoir en place depuis trop longtemps.

Mais ce n’était que le début d’une longue aventure pour le Burkina Faso, pays des Hommes Intègres.

Photo: L.Godeau (31/10/14)
Il faut admettre qu’on a été de surprises en surprises, et le plus époustouflant, c’est que cela s’est fait contre toutes les allégations et les déclarations de par le monde : « ce n’est pas parce que Blaise est parti que ça va changer », « les burkinabè ne sont pas prêts pour la transition, cela ne va pas marcher », « les militaires vont finir au pouvoir », etc.

Il est vrai que cette année 2015 a été éprouvante pour le Pays et ses habitants, tant sur le plan économique, de l’emploi, que sur le plan politique.

La situation « instable » n’attire bien sûr pas les investissements étrangers, et personne n’ayant confiance en l’avenir, tout a stagné, aucune nouveauté, aucune prise de risque… De quoi compliquer les choses au jour le jour quand il faut chercher l’argent pour vivre ou survivre...

Au niveau politique, nous avons eu droit à un rebondissement par mois, ce qui n’a permis à personne de dormir sur ses deux oreilles ou de circuler en paix :
-          - Le RSP empêche le Conseil des Ministres du 4 février 2015 ;
-          - Marches du 4 au 7 février contre la vie chère ;
-          - Grève des 17 et 18 février pour la baisse des prix du carburant ;
-          - 7 avril : tensions entre les partisans du régime de transition qui soutiennent la modification du code électoral visant l’exclusion des membres du gouvernement déchu de Blaise Compaoré de compétir aux élections présidentielles et législatives du 11 octobre 2015, et les membres de l’ex parti majoritaire, le CDP, qui rejettent toute forme d’exclusion qu’ils jugent anticonstitutionnelle ;
-          - 8 au 15 avril : appels à manifester et grève générale au Burkina : plus d’essence, plus de Brakina, plus d’eau, plus d’électricité pendant plusieurs semaines, c’est presque insoutenable ;
-          - 25 avril : marches de soutien au gouvernement de transition dans tout le pays ;
-          - Du 29 juin au 2 juillet : tirs au camp de Naba Koom opposant le RSP et Zida ;
-          - Putsch les 16 et 17 septembre : Gilbert  DIendéré, le bras-droit de Blaise Compaoré  et chef du RSP, décide de prendre le pouvoir par la force à Kossyam, le palais présidentiel. Il décide d'organiser un coup d’État en prenant en otage le président de la transition Michel Kafando, son premier ministre Isac Zida (N° 2 du RSP) et deux autres personnalités du pays. Il annonce aussi la dissolution de toutes les institutions de la transition.

Résultat : 14 morts (minimum) et plus de 251 blessés…

Mais, malgré tout cela, aussi surprenant que cela puisse être pour la communauté internationale et tous ceux qui ont pu suivre le cours des événements, le Peuple burkinabè est plein de ressources et a su, une fois encore, se relever sans trop d’égratignures.

On entend souvent des raccourcis sur l’Afrique et surtout ses gouvernements, souvent chapeautés par les pays occidentaux « anciens » colonisateurs.
Quand on regarde les informations et qu’on parle d’un soulèvement en Afrique, ou d’un putsch, la réaction la plus répandue est « comme d’habitude en Afrique », « de toutes façons ce ne sont que des dictateurs qui asservissent la population », « il n’existe pas de réelles élections en Afrique », etc. Et j’en passe et des meilleures !

Pourtant, l’Afrique change, certes pas aussi vite qu’on  le voudrait, mais les élections du 29 novembre dernier en sont la preuve : à force de luttes, de manifestations, de mobilisations, le Peuple peut avoir raison de ce type de gouvernants, ou de putschistes. 
Il suffit d’y croire et d’unir ses forces. Le pouvoir de chacun, de chaque main, chaque voix, est ainsi mis en avant. Et on en a besoin en ces temps troublés par les terrorismes en tous genres et l’individualisme ambiant.

Photo: L.Godeau (31/10/14)
Oui, l’Africain sait se construire et décider pour lui-même, il suffit de lui laisser les moyens de le faire, et de ne pas l’étouffer sous le poids des instances internationales, des IDE, des calculs FMIstes ou de la Banque Mondiale, et du pillage de ses matières premières et de ses cerveaux, obligés de s’expatrier pour trouver du travail à la hauteur de leurs diplômes.

Certes, certains s’élèveront pour me dire que le nouveau président est un ancien du régime ayant gouverné durant 27 ans, mais là n’est pas le problème ! Le Peuple a choisi, c’est ça qu’il faut retenir ! Et puis, pourquoi ne pas attendre de voir avant de faire des allégations sur quelqu’un qui n’a jamais vraiment eu les moyens de se faire entendre, même sous l’ancien gouvernement. 
Il ne peut dorénavant plus se comporter comme avant, car la population l’attend au tournant et le regarde ! 

Et puis, c’est bien beau de critiquer les autres, quand on voit qui passe aux régionales en France et monte dans les sondages pour les prochaines présidentielles ! Rien à voir avec les idées du MPP burkinabè et de Roch Kaboré, le nouveau président !! 

A l’Europe d’apprendre maintenant de l’Afrique : regardez, il est possible, en descendant dans la rue, en agissant, de faire changer les choses, même ce que l’on pensait impossible ! Ne lâchons rien, mais pour cela, il faut un peu de courage, de tripes, pour se mouiller et ne pas craindre les représailles.


Photo: L.Godeau (31/10/14)
Vive le Burkina, vive le Peuple intègre ayant tourné une page de son Histoire, la Patrie ou la Mort nous vaincrons !

Thursday, July 30, 2015

Le Passe-Murailles, amour café au lait

L’Amour est universel, mais la culture, elle, est attachée à un lieu ou un groupe de personnes partageant les mêmes idées sur le monde qui les entoure.
Ce qui nous permet d’avoir le courage de traverser des frontières, culturelles ou physiques, c’est l’amour. Il crée un attachement dépassant de nombreux obstacles.
Et des obstacles, il y en a ! 

Tout d’abord, dans la compréhension et l’analyse des choses qui nous entourent.
L’approche d’un terme, d’un geste, d’une expression ou d’un comportement peut, par l’interprétation qu’en fait chacun influencé par son environnement, être source d’incompréhensions ou de fous rires. Il faut parfois plusieurs jours pour finir par déceler la différence.

Parlons-en, tiens, de la différence … Un autre obstacle mais aussi une richesse. Au niveau des liens sociaux, la différence est grande entre deux cultures. 

D’un point de vue familial, dans la culture occidentale et dans ma culture familiale personnelle, l’un n’allant pas sans l’autre, les liens sont importants, mais une grande indépendance est laissée à chacun. Nous ne sommes pas dans l’obligation de rendre des comptes sur notre vie, et, même si nous devons assumer notre famille et tout ce qui y est attaché, passé, présent, conflits, liens, maladies, cicatrices, divorces, etc. le poids pesant sur les épaules des plus jeunes est à l’intérieur, dans le cœur, et ne se traduit pas forcément dans les rapports « physiques » au reste de la famille.



Dans la culture africaine, ces liens sont extrêmement différents, et la famille est un poids immense reposant sur la descendance. Même si nous devons parfois, nous aussi, prouver notre valeur, ici c’est une obligation envers la famille : ne pas décevoir, faire mieux que la génération d’avant, et, comble de la réussite, pouvoir subvenir aux besoins du reste de sa famille, sa femme et ses enfants d’abord, mais aussi, de ses parents. 
Pouvoir permettre au père et à la mère de vivre dans de bonnes conditions grâce à l’argent accumulé par l’enfant est une fierté et engendre le respect de la part des proches et de la société en général. Mais cela a aussi ses inconvénients, car si l’on a l’impression de ne pas être à la hauteur, le moral peut en prendre un coup.

Se marier, c’est prendre la décision de vivre sa vie auprès de l’autre, dans les bons et les mauvais moments, c’est décider de partager ce qu’on ne partageait pas jusque-là et de s’ouvrir à l’autre, celui qu’on a choisi et qui nous a choisi. L’Amour c’est la même chose. Il faut accepter celui qu’on aime avec ses qualités et ses défauts. Et il faut rester vigilant à ne pas l’oublier, et toujours lutter pour garder l’équilibre. 

Dans mon cas, un couple mixte, les différences de cultures sont souvent considérées, à tort, comme des défauts. Il suffit, pour que chacun s’y retrouve, d’adoucir les angles. 
On ne doit surtout pas renier nos racines, nos traditions, surtout pas. Mais on doit faire tout pour que les coins de nos deux mondes arrivent à s’imbriquer, comme un puzzle, chaque pièce avec une autre, pour composer le tableau final. C’est un jeu et un défi quotidien qui vaut, comme je le dis plus haut, son pesant de longues discussions voire parfois de disputes ou de silences. 
Mais le jeu en vaut la chandelle, car, à la fin, l’Amour, les liens qui nous unissent, triomphent sur les incompréhensions et nous valent de leçon de vie et d’ouverture sur le monde qui nous entoure. Cultivons la différence et non l’indifférence, c’est ce que j’ai appris depuis l’école primaire du fin fond de mon village, Montmeyran, la France d’en bas. 
C’était écrit sur une affiche au fond de la classe pour la lutte contre le racisme. C’est chaque jour que je comprends mieux cette phrase, y compris dans mon couple. Ne soyons pas ce que les autres veulent qu’on soit, mais soyons ce que nous voulons être, y compris dans notre couple, car l’Amour c’est aussi le Bonheur, et sans liberté, sans ouverture, sans compromis, le Bonheur n’accompagne plus le couple. C’est ce qui me plaît dans le mien. Même si cela peut nous valoir de nous faire la tête ou de nous fâcher sur une incompréhension, parce que chacun a peur de perdre sa liberté, c’est ce qui nous permet de nous entendre si bien et de toujours nous accorder, à la découverte l’un de l’autre.

J’avais toujours soutenu le contraire. Moi ? Me marier ? Pas besoin du mariage pour prouver qu’on s’aime ! 
Et pourtant, avec lui, toutes ces idées ont évolué. C’est simple, parfois le mariage peut être symboliquement important, culturellement, pour prouver son amour et sa sincérité. 
C’est comme dire, voilà, j’ai décidé, après avoir cherché j’ai choisi, et cette fois je ne changerai pas d’avis, c’est cette personne là et aucune autre. Les autres, car c’est aussi pour eux, leur regard, sont rassurés et mis devant le fait accompli, et nous, nous nous aimons toujours et plus encore. Je sais que c’est un élément extrêmement symbolique ici, au Burkina Faso, et peut être que je suis devenue un peu burkinabè, mais j’y trouve maintenant une valeur que je ne voyais pas auparavant, même si, au final, je me rends compte qu’il l’est aussi en France, à la vue des différentes réactions face à notre annonce auxquelles je ne m’attendais pas.

Ce lien publiquement annoncé est, après être le symbole de l’Amour qui nous unit, le moyen de prouver que nous existons en tant qu’unité, que si l’un a mal, l’autre aussi, que si l’un voyage, l’autre le peut aussi, que si l’un s’éloigne, l’autre le suit. C’est l’assurance que rien ni personne ne pourra aller à l’encontre de nos sentiments pour des raisons politiques, religieuses, économiques, sociales. C’est comme ça et vous devrez faire avec !

L’obstacle à dépasser est aussi celui des préjugés, de part et d’autre, d’une culture comme d’une autre. Je pardonne à ceux qui jugent sans savoir. Si seulement ils savaient à tel point l’amour n’a pas de frontière. Ici, c’est l’appel du gain, de l’argent, la couleur blanche étant chaque fois associée à trois noms communs : richesse, beauté et intelligence… Mais surtout le premier. 
C’est comme si on félicitait mon mari d’avoir réussi à ouvrir cette porte, tout en le regardant avec mépris et jalousie. Dans le même temps, on se complait à nous mettre des bâtons dans les roues pour se faire plaisir face au passé colonial en Afrique et à toutes les politiques contemporaines que pratique mon pays et dont nous subissons quelques maigres conséquences. Mais cette jalousie et cette envie de nous voir désunis, c’est aussi parce qu’ici, le malheur des uns fait le bonheur des autres. C’est toujours plus facile de trouver les chèvres plus grasses chez le voisin. Et c’est amusant de voir un couple, surtout mixte, ne pas fonctionner, car c’est ce qu’on disait dès le début en les voyant main dans la main : « ça ne va pas durer, regarde-les, demain ils se sépareront, il va obéir à sa blanche jusqu’à ce qu’il n’en puisse plus et qu’il se décide enfin à partir ! ».

Dans la culture française, c’est un préjugé différent mais de même nature : la jalousie. C’est un africain, il va la dépouiller, ou bien se servir d’elle pour immigrer en France et ensuite la laisser seule, l’abandonner, peut être après lui avoir laissé un enfant sur les bras, ce n’est pas de l’amour. Elle doit faire attention, la loi est différente en Afrique, elle pourrait se faire avoir.


Pourtant, bon nombre de couples mixtes vivent heureux, nous y compris, et restent ensemble contre vents et marées, sans porter d’intérêt à ce type de discours qui ne les découragent pas, au contraire : je n’en suis que plus convaincue de mon choix ! Je t’aime, Yves, haut de tes 2m, avec tes blagues à faire rire toute une assemblée (et même des occidentaux ! J ), avec ton caractère bien trempé et tes attaches familiales qui peinent à te laisser t’envoler. 

Je t’aime pour toutes tes qualités et tous tes défauts !