L’Amour
est universel, mais la culture, elle, est attachée à un lieu ou un groupe de
personnes partageant les mêmes idées sur le monde qui les entoure.
Ce
qui nous permet d’avoir le courage de traverser des frontières, culturelles ou
physiques, c’est l’amour. Il crée un attachement dépassant de nombreux
obstacles.
Tout d’abord, dans la compréhension et
l’analyse des choses qui nous entourent.
L’approche
d’un terme, d’un geste, d’une expression ou d’un comportement peut, par
l’interprétation qu’en fait chacun influencé par son environnement, être source
d’incompréhensions ou de fous rires. Il faut parfois plusieurs jours pour finir
par déceler la différence.
Parlons-en,
tiens, de la différence … Un autre obstacle mais aussi une richesse. Au niveau
des liens sociaux, la différence est grande entre deux cultures.
D’un point de
vue familial, dans la culture occidentale et dans ma culture familiale
personnelle, l’un n’allant pas sans l’autre, les liens sont importants, mais
une grande indépendance est laissée à chacun. Nous ne sommes pas dans
l’obligation de rendre des comptes sur notre vie, et, même si nous devons
assumer notre famille et tout ce qui y est attaché, passé, présent, conflits,
liens, maladies, cicatrices, divorces, etc. le poids pesant sur les épaules des
plus jeunes est à l’intérieur, dans le cœur, et ne se traduit pas forcément
dans les rapports « physiques » au reste de la famille.
Pouvoir permettre au père et à la
mère de vivre dans de bonnes conditions grâce à l’argent accumulé par l’enfant
est une fierté et engendre le respect de la part des proches et de la société
en général. Mais cela a aussi ses inconvénients, car si l’on a l’impression de
ne pas être à la hauteur, le moral peut en prendre un coup.
Se
marier, c’est prendre la décision de vivre sa vie auprès de l’autre, dans les
bons et les mauvais moments, c’est décider de partager ce qu’on ne partageait
pas jusque-là et de s’ouvrir à l’autre, celui qu’on a choisi et qui nous a
choisi. L’Amour c’est la même chose. Il faut accepter celui qu’on aime avec ses
qualités et ses défauts. Et il faut rester vigilant à ne pas l’oublier, et
toujours lutter pour garder l’équilibre.
On ne doit surtout
pas renier nos racines, nos traditions, surtout pas. Mais on doit faire tout
pour que les coins de nos deux mondes arrivent à s’imbriquer, comme un puzzle,
chaque pièce avec une autre, pour composer le tableau final. C’est un jeu et un
défi quotidien qui vaut, comme je le dis plus haut, son pesant de longues
discussions voire parfois de disputes ou de silences.
Mais le jeu en vaut la
chandelle, car, à la fin, l’Amour, les liens qui nous unissent, triomphent sur
les incompréhensions et nous valent de leçon de vie et d’ouverture sur le monde
qui nous entoure. Cultivons la différence et non l’indifférence, c’est ce que
j’ai appris depuis l’école primaire du fin fond de mon village, Montmeyran, la
France d’en bas.
C’était écrit sur une affiche au fond de la classe pour la
lutte contre le racisme. C’est chaque jour que je comprends mieux cette phrase,
y compris dans mon couple. Ne soyons pas ce que les autres veulent qu’on soit,
mais soyons ce que nous voulons être, y compris dans notre couple, car l’Amour
c’est aussi le Bonheur, et sans liberté, sans ouverture, sans compromis, le
Bonheur n’accompagne plus le couple. C’est ce qui me plaît dans le mien. Même
si cela peut nous valoir de nous faire la tête ou de nous fâcher sur une
incompréhension, parce que chacun a peur de perdre sa liberté, c’est ce qui
nous permet de nous entendre si bien et de toujours nous accorder, à la
découverte l’un de l’autre.
J’avais
toujours soutenu le contraire. Moi ? Me marier ? Pas besoin du
mariage pour prouver qu’on s’aime !
Et pourtant, avec lui, toutes ces
idées ont évolué. C’est simple, parfois le mariage peut être symboliquement
important, culturellement, pour prouver son amour et sa sincérité.
C’est comme
dire, voilà, j’ai décidé, après avoir cherché j’ai choisi, et cette fois je ne
changerai pas d’avis, c’est cette personne là et aucune autre. Les autres, car
c’est aussi pour eux, leur regard, sont rassurés et mis devant le fait
accompli, et nous, nous nous aimons toujours et plus encore. Je sais que c’est
un élément extrêmement symbolique ici, au Burkina Faso, et peut être que je
suis devenue un peu burkinabè, mais j’y trouve maintenant une valeur que je ne
voyais pas auparavant, même si, au final, je me rends compte qu’il l’est aussi
en France, à la vue des différentes réactions face à notre annonce auxquelles
je ne m’attendais pas.
Ce
lien publiquement annoncé est, après être le symbole de l’Amour qui nous unit,
le moyen de prouver que nous existons en tant qu’unité, que si l’un a mal, l’autre
aussi, que si l’un voyage, l’autre le peut aussi, que si l’un s’éloigne,
l’autre le suit. C’est l’assurance que rien ni personne ne pourra aller à
l’encontre de nos sentiments pour des raisons politiques, religieuses,
économiques, sociales. C’est comme ça et vous devrez faire avec !
L’obstacle
à dépasser est aussi celui des préjugés, de part et d’autre, d’une culture
comme d’une autre. Je pardonne à ceux qui jugent sans savoir. Si seulement ils
savaient à tel point l’amour n’a pas de frontière. Ici, c’est l’appel du gain,
de l’argent, la couleur blanche étant chaque fois associée à trois noms
communs : richesse, beauté et intelligence… Mais surtout le premier.
C’est
comme si on félicitait mon mari d’avoir réussi à ouvrir cette porte, tout en le
regardant avec mépris et jalousie. Dans le même temps, on se complait à nous
mettre des bâtons dans les roues pour se faire plaisir face au passé colonial
en Afrique et à toutes les politiques contemporaines que pratique mon pays et
dont nous subissons quelques maigres conséquences. Mais cette jalousie et cette
envie de nous voir désunis, c’est aussi parce qu’ici, le malheur des uns fait
le bonheur des autres. C’est toujours plus facile de trouver les chèvres plus
grasses chez le voisin. Et c’est amusant de voir un couple, surtout mixte, ne
pas fonctionner, car c’est ce qu’on disait dès le début en les voyant main dans
la main : « ça ne va pas durer, regarde-les, demain ils se sépareront,
il va obéir à sa blanche jusqu’à ce qu’il n’en puisse plus et qu’il se décide
enfin à partir ! ».
Dans
la culture française, c’est un préjugé différent mais de même nature : la
jalousie. C’est un africain, il va la dépouiller, ou bien se servir d’elle pour
immigrer en France et ensuite la laisser seule, l’abandonner, peut être après
lui avoir laissé un enfant sur les bras, ce n’est pas de l’amour. Elle doit
faire attention, la loi est différente en Afrique, elle pourrait se faire
avoir.
Pourtant,
bon nombre de couples mixtes vivent heureux, nous y compris, et restent
ensemble contre vents et marées, sans porter d’intérêt à ce type de discours
qui ne les découragent pas, au contraire : je n’en suis que plus
convaincue de mon choix ! Je t’aime, Yves, haut de tes 2m, avec tes
blagues à faire rire toute une assemblée (et même des occidentaux ! J ), avec ton caractère bien trempé et
tes attaches familiales qui peinent à te laisser t’envoler.
Je t’aime pour
toutes tes qualités et tous tes défauts !